L’industrie horlogère suisse envoie des signaux contradictoires. Malgré une augmentation des exportations en août, les perspectives pour la fin de l’année 2024 demeurent négatives. La baisse de la demande en Chine et à Hong Kong, couplée à la force du franc suisse, pose des défis majeurs au secteur. Décryptage d’une situation complexe qui ébranle l’un des fleurons de l’économie helvétique.
Des chiffres en hausse, mais une tendance inquiétante
Selon les derniers chiffres publiés par la Fédération de l’industrie horlogère suisse, les exportations de montres ont connu une croissance de 6,9% en valeur en août 2024 par rapport à l’année précédente, atteignant 2 milliards de francs suisses (soit environ 2,1 milliards d’euros). Cette hausse, supérieure à celle de 1,6% enregistrée en juillet, porte le total des exportations pour les huit premiers mois de l’année à 17,1 milliards de francs suisses (environ 17,9 milliards d’euros).
Cependant, malgré ces chiffres apparemment positifs, la Fédération maintient un ton prudent. Elle souligne que « la tendance reste négative, tout comme les perspectives pour le reste de l’année ». Cette mise en garde reflète les inquiétudes croissantes au sein de l’industrie.
Un marché contrasté selon les régions et les gammes de prix
L’analyse détaillée des données révèle des disparités importantes selon les marchés :
- Les exportations vers les États-Unis, premier marché de l’horlogerie suisse, ont augmenté de 8%
- La Chine, deuxième marché en importance, a enregistré une baisse de 6%
- Hong Kong a subi une chute encore plus prononcée de 11%
Ces chiffres mettent en lumière les difficultés rencontrées sur les marchés asiatiques, traditionnellement cruciaux pour l’industrie horlogère suisse.
Par ailleurs, on observe une segmentation marquée selon les gammes de prix :
- Les montres d’entrée et de milieu de gamme (prix d’exportation inférieur à 3 000 francs suisses, soit environ 3 150 euros) ont vu leurs exportations chuter de 14% en valeur et 11% en volume
- Les montres haut de gamme, particulièrement celles en métaux précieux, ont enregistré de meilleures performances avec une hausse de 5% en volume et 15% en valeur
Cette disparité souligne la résilience du segment du luxe face aux turbulences économiques.
Les défis majeurs de l’industrie horlogère suisse
Plusieurs facteurs contribuent aux difficultés actuelles du secteur :
1. La force du franc suisse
La vigueur de la monnaie helvétique pénalise les exportateurs. Fin 2023, le franc a atteint son plus haut niveau face au dollar américain depuis 2015. Cette situation rend les montres suisses plus chères à l’étranger, affectant leur compétitivité.
2. Le ralentissement économique en Chine
La Chine, deuxième marché mondial pour l’horlogerie suisse, connaît un ralentissement économique qui impacte directement la demande de produits de luxe, dont les montres haut de gamme.
3. L’instabilité à Hong Kong
Hong Kong, traditionnellement une plaque tournante pour le commerce des montres de luxe en Asie, continue de subir les conséquences des tensions politiques et de la pandémie, se traduisant par une baisse significative des ventes.
Les stratégies d’adaptation de l’industrie
Face à ces défis, l’industrie horlogère suisse met en place diverses stratégies :
- Appel à la banque centrale suisse pour affaiblir le franc
- Utilisation du programme gouvernemental de chômage partiel pour éviter les licenciements
- Focalisation sur le segment haut de gamme, qui résiste mieux à la crise
- Recherche de nouveaux marchés pour compenser le ralentissement en Asie
Perspectives pour la fin de 2024
Malgré la hausse des exportations en août, les perspectives pour la fin de l’année 2024 restent incertaines. Les entreprises du secteur font état d’un manque de visibilité à moyen terme, les incitant à adopter une approche plus prudente. Certaines envisagent même des réductions d’activité.
Jean-Philippe Bertschy, analyste chez Vontobel, résume la situation : « Le haut de gamme du secteur horloger continue de bien se porter. Pour les autres marques, 2024 représente une forte remise à zéro et une normalisation de la croissance après le boom post-Covid. »
Un secteur résilient face aux défis
L’industrie horlogère suisse, qui a généré un record de 31 milliards de francs suisses (environ 32,5 milliards d’euros) en 2023, fait preuve de résilience face à ces défis. Cependant, la fin de l’année 2024 s’annonce cruciale pour déterminer la trajectoire future du secteur.
Les prochains mois seront déterminants pour voir si l’industrie peut maintenir sa croissance malgré les vents contraires économiques et géopolitiques. La capacité d’adaptation et d’innovation des marques suisses, ainsi que leur prestige historique, seront des atouts majeurs pour traverser cette période d’incertitude.
L’horlogerie suisse, symbole d’excellence et de tradition, se trouve à un tournant. Sa capacité à naviguer dans ces eaux troubles déterminera non seulement son avenir immédiat, mais aussi sa place dans le paysage du luxe mondial pour les années à venir.
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- Des chiffres en hausse, mais une tendance inquiétante
- Un marché contrasté selon les régions et les gammes de prix
- Les défis majeurs de l’industrie horlogère suisse
- 1. La force du franc suisse
- 2. Le ralentissement économique en Chine
- 3. L’instabilité à Hong Kong
- Les stratégies d’adaptation de l’industrie
- Perspectives pour la fin de 2024
- Un secteur résilient face aux défis